Témoignage de Désirée Azzi, Psychologue clinicienne à L’association Libami Beyrouth.
Objet : État psychologique des enfants traumatisés par la guerre au Liban à l’association Libami.
Psychologue clinicienne engagée aux côtés de l’association Libami, je vous écris pour vous alerter sur l’impact dévastateur de la guerre actuelle contre le Liban sur l’état psychologique des enfants réfugiés et affectés par la guerre contre le Liban.
Ces enfants, contraints de fuir leur foyer et de vivre dans des conditions précaires, subissent des traumatismes multiples qui affectent profondément leur développement émotionnel et mental. En travaillant de près avec eux, j’ai pu constater une grande variété de troubles, allant bien au-delà du mutisme traumatique, touchant leur capacité à vivre normalement et à se projeter dans l’avenir.
Voici quelques exemples des manifestations psychologiques les plus fréquentes que nous rencontrons :
1. Dépression profonde : De nombreux enfants présentent des symptômes de tristesse chronique, d’apathie et de désintérêt total pour les activités autrefois plaisantes. Certains refusent de manger ou de jouer, exprimant un désespoir qui dépasse leur âge.
2. Isolement social : Certains enfants, par peur ou par incapacité à se lier avec les autres, s’isolent complètement. Ils évitent tout contact, même avec leurs propres familles, et passent des heures seuls, souvent en silence ou en fixant un point dans le vide.
3. Anxiété et hypervigilance : La peur constante d’un nouveau bombardement ou d’une attaque rend de nombreux enfants extrêmement nerveux. Chaque bruit soudain ou mouvement inattendu déclenche des réactions disproportionnées : pleurs, tremblements, ou recherche immédiate d’un endroit pour se cacher.
4. Phobies spécifiques : Certains développent des peurs irrationnelles liées à leur expérience traumatique. Par exemple, un enfant pourrait refuser de sortir à l’extérieur par crainte d’un avion ou s’effondrer en crise de panique en entendant le son d’une sirène.
5. Troubles du sommeil : Les cauchemars récurrents et l’insomnie sont fréquents. Ces enfants sont souvent incapables de dormir sans se réveiller en criant ou en pleurant, hantés par des flashbacks de scènes violentes qu’ils ont vécues.
6. Troubles cognitifs : Les capacités de concentration et d’apprentissage sont souvent gravement compromises. Certains enfants présentent un ralentissement psychomoteur, tandis que d’autres peinent à suivre les activités scolaires proposées, même dans les contextes d’éducation d’urgence.
Face à cette réalité, l’association Libami met en place des interventions adaptées pour tenter d’apporter un soutien psychologique à ces enfants. Nous privilégions des approches comme l’art-thérapie, les jeux structurés et surtout L’Ecoute pour leur offrir un espace où ils peuvent exprimer leurs émotions et se sentir en sécurité.
Cependant, les besoins dépassent largement nos capacités actuelles. Le soutien de partenaires comme vous est essentiel pour renforcer nos équipes sur le terrain, aménager des espaces dédiés au bien-être des enfants et garantir un suivi thérapeutique à long terme.
Ces enfants portent les cicatrices invisibles de la guerre. En travaillant ensemble, nous pouvons leur redonner l’espoir d’un avenir meilleur et leur permettre de retrouver une forme de stabilité.